Du pixel à la post it war


Au commencement étaient les balbutiements de l’image numérique, qui est, comme chacun sait, formée d’une infinité de points carrés : le pixel. Au commencement était l’image, de mauvaise qualité, des premiers jeux vidéo. Cette image pleine de petits carrés, qu’on tentait d’oublier -il n’y a qu’à comparer avec les images que nous proposent jeux, appareils photos ou téléphones actuels pour constater en grand format ce qu’une image donne aujourd’hui, cette image où les pixels apparaissent à tous les coins des courbes – car le pixel résout la quadrature du cercle-, a été glorifiée tout cet été à coups de post it war.

Le jeu consiste en effet à de dessiner quelque chose avec papiers carrés sur les vitres de son bureau, et de « déclarer la guerre » aux sociétés voisines. Déclarée à Paris mais essaimant en province et en Europe elle a donc repris des personnages des premiers jeux vidéo, en l’occurrence, et pour les premiers balbutiements de cette guerre : « space invaders ». Pourquoi les répliques eurent-elles le plus souvent comme base des images de cette époque ? Pourquoi le rond Pac Man fleurit-il dans tous les open spaces -? Bien sûr la simplicité de son graphisme et la facilité pour trouver sa couleur de post-it y ont-ils pour quelque chose. Mais pas seulement. Alors que nombre de ces guerriers du post-it n’ont directement connu que les belles images bien arrondies, ils ont choisi ces survivants de races oubliées. La nostalgie est-elle plus forte que tout ? Pas seulement, et j’en veut pour preuve le succès interplanétaire du nyan cat.

Alors faut-il voir un rejet de ces dessins 3D exagérément ronds et lisses alors même que le pixel est au cœur de notre nouvelle façon d’appréhender les images puisqu’il nous permet de corriger les plus infimes imperfections de nos photos lorsque nous jouons des logiciels de retouche avec pour but avoué de mieux l’oublier ensuite, ce vilain petit carré ! âme de l’image, partie infinitésimale peut-être, de cet atome à angles droits.

Pourtant dans la nature, ou le dessin classique, le carré est très limité, les courbes plus habituelles que les angles droits d’où l’idée d’utiliser un nombre impressionnant de post-it pour créer un dessin. Car plus le dessin est grand, moins on voit le post-it, et moins on s’approche de la pixellisation à outrance. Dans cette guerre de l’heure de déjeuner, c’est pour l’instant la Société Générale qui détient le record du plus beau dessin de post-it war. Sur 6 étages, Obélix porte Astérix en triomphe, face à Tintin et sa fusée (GDF-Suez). En résumé, la BD franco-belge prend le contrôle de la guerre des pixels, en en faisant une guerre de dessins en HD. On prend la même base, et on change tout, on passe de Mario à un jeu en 3D, ce qu’a déjà démontré Guerlain avec une non moins impressionnante bouteille de Shalimar Shalimar, le tout dans une récupération en mouvements de culture d’entreprise assez hallucinants. Plus économique en temps, en en moyens, plus médiatisé qu’un stage spéléo dans les Cévennes ou un Congrès aux Antilles, la post it war de nos personnages fétiches qui clame la victoire du petit teigneux gaulois tout en fédérant le personnel.Asterix et Obelix

Quant à l’utilisation des post-it, elle a montré ses limites, puisque les post-it se décollent -bien sur c’est leur principe- et ne tiennent que peu de temps sur les vitres, mais, et on l’avait déjà remarqué sur les dossiers, feuilles… les post-it s’envolent, les notes virtuelles restent.